Seul again à Moscou

1

À la fenêtre, il neigeait sur Moscou.

Les flocons tombaient comme des cendres venues de feux lointains, éteints peut-être entre temps.

Les flocons tombaient en trajectoires imprévisibles comme sur les humains la mort.

Les flocons tombaient, recouvraient la route et le parking et mes rêves de te revoir un jour.

2

Violette, la fumée déferlait sur le ciel de Moscou pâle, bleu et doré par le crépuscule à 15 h 30.

           La fumée déferlait, horizontale et lasse, laissant sous son dos plat de violets ronds d’écume surgir, puis tournebouler sur les toits

des hangars, des usines alignés au fond du champ de givre qui me rappelait au moment des adieux ton sourire glacé.

3

L’eau de la Moskova était noire entre les fragments de glace brisée, comme le ciel et les arbres noire et comme une promesse.

Luisaient la glace et en face les tours du ministère de la Défense et autour de moi la neige entre les arbres et sur le quai.

Je t’ai désirée ce jour-là, barbare comme un souvenir,                                     et puis j’ai vu flotter les pattes prisonnières d’un carreau gelé qui descendait le fleuve, un canard digne.